lundi 1 mai 2017

Antipode scolaire 1: les systèmes

Au même titre que dans l'hémisphère sud, le soleil tourne à l'envers (oui, parfaitement, je voudrais bien vous y voir quand vous garez votre voiture sous un arbre de manière à ce qu'elle reste à l'ombre tout l'après midi!), l'eau dans le lavabo aussi (mais ça on s'en fout), la croix du sud apparait dans le ciel (et les aurores australes, mais ça fera l'objet d'un autre article), le système scolaire est lui aussi agencé différemment.
Je vous entends déjà: ce n'est pas une question d'hémisphère, me direz vous, car le système scolaire néo-zélandais est plus porche du système anglo saxon, américain, que du nôtre. Soit.
Vous avez déjà pu lire l'article rédigé par Yaelle: les horaires sont différents et plus légers que les nôtres, les matières enseignées moins nombreuses dans la semaine mais changent chaque trimestre, les écoles proposent plus d'ateliers que chez nous, chaque trimestre des journées entières sont consacrées au sport, il y a des maisons qui ont chacune leur identité et servent notamment lors des journées sportives.
Cela me plait sur le principe, mais ce ne sont pas ces sujets que je voudrais développer ici.
Chronologiquement, passés les contacts (enthousiastes!) que nous avons eu lors de l'inscription et les modalités de pré-rentrée (bus, uniformes, équipement informatique), notre premier jour, je dis bien "notre" puisque les parents des nouveaux élèves sont accueillis aussi, a été pour le moins antipodiquement différent de ce qu'on peut trouver dans un collège de notre métropole. Je résume: tous les nouveaux élèves, leurs familles et les nouveaux profs sont d'abord accueillis dans la bibliothèque avec un discours de bienvenue et une présentation de chaque nouveau prof. Au bout d'un quart d'heure, nous sommes dirigés vers le "hall" (gymnase), les garçons et les hommes d'abord, les filles et les femmes ensuite. En entrant dans le hall nous chantons un chant maori que nous venons d'apprendre dans la bibliothèque (on répète chaque phrase). Les chaises libres font face à l'assemblée déjà assise. Les hommes sont à gauche, les femmes à droite. Lorsque nous sommes assis et silencieux, sur l'estrade située sur le côté sont donnés chants et haka de bienvenue. Impressionnant. Ensuite, sont donnés des discours en maori puis en anglais pour présenter l'année,. Puis les hommes vont faire un salut maori (avec le front) à l'équipe de direction (y compris les "préfets" qui sont des élèves délégués). (Pourquoi pas les femmes?) Enfin bref, ainsi s'achève la cérémonie solennelle de rentrée, nous ressortons abasourdis, impressionnés. Ensuite, une petite réflexion nous vient sur notre façon à nous, en France, d'accueillir les nouveaux, que ce soit au collège, au boulot, au village: souvent, rien, le vide sidéral. Cela laisse à réfléchir.
Nous avons épluché les papiers de rentrée et regardé la vidéo de présentation. Voici ce que dit juste un document de rentrée (au milieu des autres documents présentant le règlement intérieur, l'uniform shop et l'utilisation d’internet, entre autres) à propos des valeurs du collège:
Respect (being polite, showing respect, caring for our surroundings)
Integrity (Being honest and trustworthy, responsible, following through on your commitments)
Success (Giving your best, persevering, identify goals and achieving)
Empathy (Caring for others, being communiy-minded, treating others the way you want to be treated)
L'acronyme RISE: synonyme de progresser, augmenter, dépasser, grandir.

Puis au fil des jours nous avons pu constater que le niveau académique est moins élevé ici (notamment en maths: Maïwenn avait pour mission d'apprendre les multiplications et les additions) et que le rapport élèves-professeur est différent.
Nous avons trouvé tout ce monde incroyablement tourné vers les valeurs humaines, ce qui s'est confirmé par les premiers cours des filles, avec des profs qui se présentent personnellement, et des questionnaires concernant non seulement l'identité mais aussi les loisirs, projets et qualités des filles. Je reviens sur la présentation personnelle de chaque professeur:je trouve cela utile non pour connaitre leur vie privée, mais en cela que la référence de chaque adulte est importante, surtout ceux avec lesquels vous passez une majeure partie de votre scolarité, et de savoir que vous avez des qualités, des préférences, des buts communs ou différents peut contribuer à la formation de l'identité propre de chaque élève.
Nous avons également trouvé les interlocuteurs très empathiques qui se sont mis en quatre pour que Maïwenn se sente bien au collège. Et oui, pas facile de s'intégrer quand on n'a qu'une année d'anglais derrière soi, et quand on met déjà habituellement du temps à se faire des amis dans sa propre langue!
Changement d'emploi du temps, changement de classe, avec aménagements spéciaux pour accéder aux options "art" et "woodwork technology", "parce que ce ne sont pas les apprentissages académiques qui sont importants ici", a précisé le proviseur adjoint, "l'important c'est qu'elle soit heureuse pendant son expérience humaine néo-zélandaise". Et les mails de la conseillère pédagogique le soir après le collège pour raconter les jeux pendant le lunch time à la bibliothèque, ou le dimanche soir pour annoncer que l'atelier bois était intégré à l’emploi du temps. Amazing! (Est-ce que ça va marcher? Vous le saurez au prochain épisode!).
Par ailleurs, je viens de recevoir un mail qui annonce un programme ponctuel pour les year 10 concernant santé et sexualité, dans lequel seront abordés la santé et la sexualité positive, la capacité de résilience, apprendre à montrer de l'empathie et  développer des compétences relationnelles.
Ceci étant dit, je ne voudrais pas tomber dans l'écueil dichotomique qui consisterait à opposer nos systèmes scolaires. (Et à dire qu'en France personne n'a de valeur humaine, ha ha!)
Le système scolaire néo-zélandais est tourné vers les valeurs humaines, et c'est un énorme avantage. D'un autre côté, pourrions-nous dire en bon franco-français, le niveau académique n'est pas aussi élevé que celui de la France. Évidemment, comment feraient-ils, avec un emploi du temps à 25 heures de cours par semaine au collège, et presque sans devoirs (encore que c'est mal réparti: pourquoi Maïwenn en a et pas Yaelle?), pour acquérir autant de connaissances que nous! D'accord, je force le trait, mais j'aurais deux réflexions à ce propos: premièrement, d'après ce qu'on peut lire les élèves n’auraient besoin que de très peu de devoirs, deuxièmement, les apprentissages sont au moins autant axées sur la capacité (et la diversification des méthodes) d'apprentissage que sur les connaissances elles-mêmes.
Et en parlant de notre bonne vieille Europe,  pourquoi n'irions-nous pas voir du côté du Danemark, qui axe la scolarité sur la capacité à prendre des décisions, ce n'est pas mal non plus!
Voilà, cet article a été rédigé en pensant à Lulu, qui avait posé plein de questions, et, si jamais, mon grain de sable pourra peut-être contribuer à faire pencher la balance un peu moins vers l’idéologie de la performance et un peu plus vers la connaissance de soi et le développement de l'empathie chez nos élèves.

 


1 commentaire:

  1. Pour ce qui me concerne, tu prêches un convaincu... mais bon j'suis pas français... simple fonctionnaire, exécuteur des basses œuvres ministérielles ;)

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